A 28 ans, Patrick connaissait un excellent début de carrière. Sorti d’une école de commerce parisienne quatre ans plus tôt, il était chef de projet dans un groupe industriel implanté dans la région lyonnaise. Tout se déroulait au mieux et sa jeune épouse et lui profitaient des avantages d’une vie professionnelle riche et du confort que leur procuraient leurs deux salaires.
Malgré cela, Patrick était la proie d’une inquiétude chronique provoquant une tension nerveuse excessive et dont il ne venait à bout qu’en pratiquant plusieurs fois par semaine, la natation et le jogging. Il en revenait physiquement fatigué mais pas profondément détendu. Ayant fait beaucoup de sport très jeune, il était très puissant et endurant. C’est ainsi qu’il avançait dans la vie, en force et en faisant preuve d’une volonté impressionnante.
Lorsque je le rencontrai, je lui posai ma question favorite : qui voulez-vous être ? Patrick y avait déjà beaucoup réfléchi sans y voir très clair. Nous étudiâmes ensemble son profil psychologique.
Patrick était un homme naturellement conciliant. Il allait spontanément vers l’autre avec une gentillesse à laquelle on ne pouvait être indifférent. En cas de conflit, il cherchait systématiquement à se rapprocher de l’autre pour trouver une solution. Il était sensible, diplomate, chaleureux, bienveillant et pacifique. Patrick avait un autre trait de caractère dominant : autonome et créatif, il aimait affirmer son individualité et il savait se battre pour gagner.
Idéalement, ces deux traits de caractère se complètent. Avoir une individualité forte tout en étant ouvert aux autres, constitue un puissant potentiel de développement. Il arrive cependant que l’équilibre soit difficile à trouver si celui qui cherche l’entente est dominé par ceux avec lesquels il veut s’accorder, ou pire, par ceux dont il veut être aimé. Il me sembla que Patrick avait vécu cela et que l’affirmation de son individualité en avait souffert. En pareil cas, c’est l’image que l’on a de soi-même qui en pâtit. Ma prestation n’étant pas celle d’un psychothérapeute, nous nous contentâmes de souligner le conflit entre ses deux traits de caractère dominants sans en chercher les causes.
Après avoir fait la synthèse de ses traits de caractère principaux, je posai à nouveau ma question favorite : « qui voulez-vous être ? ». Patrick répondit assez longuement. Je l’aidai à se centrer sur les éléments essentiels et il déclara, quelques minutes avant la fin de notre entretien : « je veux être un leader enthousiaste ». En disant cela, Il manifestait son désir de développer son autonomie tout en jouant le rôle de rassembleur, il exprimait son besoin de s’accorder avec les autres en laissant son individualité s’épanouir, d’être relié aux autres sans être soumis. Alors qu’il faisait cette déclaration, il se redressa sur sa chaise.
Dans les mois qui suivirent, Patrick s’appliqua à devenir ce leader enthousiaste. Il observait chacune de ses décisions, de ses réactions, de ses pensées, pour voir si elles l’aidaient à s’en rapprocher ou au contraire, si elles l’en éloignaient. Une fois par mois, nous faisions le point au téléphone. Il me disait fréquemment que sa vie était devenue plus facile, qu’il se sentait moins tiraillé et qu’il ne gaspillait plus son énergie à s’imposer des compromis si une partie de lui-même les refusait. Son image de lui-même s’améliorait et il n’avait plus autant besoin de l’approbation des autres. Il continuait cependant à la rechercher, pour le plaisir. Il avait l’impression de se libérer. Il restait conciliant mais il n’avait plus de difficulté à faire valoir pacifiquement ses points de vue. Il lui semblait renaître.
La baisse de la tension nerveuse fut bénéfique à plusieurs titres. Il travaillait plus efficacement et faisait preuve d’une plus grande conviction. Ses attentes vis-à-vis des autres étaient moins grandes, aussi ces derniers venaient-ils plus spontanément vers lui. Patrick réussissait à créer des liens par plaisir plus que par nécessité. Ses affaires se développaient mieux mais surtout, il se sentait plus lui-même et il en profitait donc plus. Il ne ressentait plus la fatigue s’abattre sur lui le soir et les week-ends. Pour favoriser encore plus la fluidité, il s’inscrivit à un cours de Gi Gong.
« Etre » lui-même lui permettait de « faire » ce qu’il voulait faire, plus facilement et par conséquent d’ « avoir » de meilleurs résultats.
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