A 40 ans, Hervé était depuis deux ans, sur un chemin qui lui convenait parfaitement. Nous convînmes rapidement qu’il était né pour être libre et indépendant, pour découvrir le monde, pour innover, il avait créé une association humanitaire avec laquelle il récoltait des fonds pour aider les projets de développement de populations particulièrement défavorisées sur les cinq continents. Il aimait les voyages et son objectif principal vis-à-vis des bénéficiaires des programmes, était de leur permettre de devenir économiquement indépendants. Souvent, la générosité consiste à offrir aux autres ce dont on rêve pour soi-même.
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Outre ce talent d’aventurier, Hervé était très communicatif. Il avait besoin d’une activité grâce à laquelle il pouvait exprimer ce qui lui tenait à cœur et porter ses valeurs en bandoulière. De plus, en dépit de son goût pour l’indépendance, Hervé était capable de prendre en charge les autres, de se sentir responsable de leur bien-être : un don essentiel dans son activité.
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Hervé n’avait donc pas de problèmes existentiels, en revanche, sa jeune association avait besoin d’argent et il avait une certaine difficulté de ce côté-là. Pour des raisons liées à son éducation, il avait du mal à aller au bout de sa démarche auprès des éventuels donateurs. Il s’impliquait totalement dans la présentation des projets en attente de financement mais lorsqu’il fallait prendre la main de son interlocuteur et lui faire signer un engagement de don, il calait.
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Hervé évoqua son rapport à l’argent et les croyances restrictives qu’il entretenait à son égard. Nous passâmes rapidement sur l’origine du problème pour nous intéresser à la solution et je lui demandai qui il pourrait être pour faire sauter ce blocage. Il était sincère, généreux, enthousiaste : que lui manquait-il ?
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Je lui suggérai de voir que la façon dont il parvenait à obtenir l’attention de ses interlocuteurs était essentiellement en « étant » gentil. Cette gentillesse rendait sa démarche totalement légitime à ses propres yeux, en revanche, lorsqu’il s’agissait de demander de l’argent, il s’arrêtait et attendait que le futur donateur donne spontanément.
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- Quelles qu’en soient les raisons, ces scrupules ne sont pas justifiés et vous handicapent. Qui pourriez-vous être pour les dépasser, demandai-je à nouveau ?
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Il s’agissait comme à l’accoutumé, de s’appuyer sur un trait de caractère inné.
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Hervé évoqua différents qualificatifs : mordant, punchy, killer. Aucun n'arrivait à le convaincre complètement même s’ils faisaient tous partie de la panoplie de l’aventurier qu’il était. Ils étaient dans sa nature mais représentaient un saut un peu trop important.
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Je lui suggérai de réfléchir à la possibilité d’« être direct » :
- Vous n’avez pas besoin d’être agressif mais simplement d’aller directement jusqu’au bout de votre démarche. Ce que vous proposez a de la valeur pour le donateur, cela lui apporte quelque chose d’important. Vous connaissez très bien les bénéfices qu’il peut en retirer. Son retour sur investissement est réel même s’il n’est pas financier. Vous pouvez être direct et lui demander exactement le montant dont vous avez besoin pour faire aboutir le projet. Si vous ne le faites, votre interlocuteur sera suspicieux. Il pensera que ce que vous lui proposez n’est pas sérieux.
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Hervé réalisa qu’être direct lui permettrait de développer beaucoup mieux son potentiel et ses talents. Son sourire était significatif, la perspective d'être direct le libérait, lui qui était né pour être libre.
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Je lui suggérai de ne pas chercher à se changer mais de s’observer chaque jour pour voir si son comportement, ses paroles et ses pensées lui permettaient « d’être » cette personne directe qu’il voulait être. « Vous observer chaque jour, lui dis-je, vous permettra de prendre conscience des multiples opportunités que vous aurez d’être qui vous voulez être et les changements se feront dans la facilité car ils iront dans le sens de l’épanouissement de votre nature profonde. »
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Hervé suivit ma recommandation et nos conversations ultérieures lui permirent de constater à quel point la simple observation produisait des effets importants. Ne pas se contraindre à se changer est primordial. Comment peut-on être motivé par un tel objectif ? Être soi-même est bien plus puissant et c’est ce qu’Hervé devenait de plus en plus. Aventurier dans l’âme, il y avait un domaine dans lequel il ne s’était pas autorisé à aller droit au but : l’argent. En ayant choisi d’être direct, il avait enclenché un processus de libération qui lui permettait un épanouissement plus large de ses talents innés.